La Celestial 5102 qui fut présentée en 2002 au Salon de Bâle est selon moi une des plus belles Patek Philippe contemporaine. Elle combine tout ce recherche l'amateur éclairé au sein d'une montre: un mouvement performant, un cadran d'une rare beauté, une complication astronomique certes inutile mais envoûtante, le tout avec le savoir-faire de la plus prestigieuse des manufactures. Malheureusement, depuis quelques années, Patek Philippe a tendance à proposer des évolutions de la Celestial que je ne trouve pas forcément indispensables.
Ainsi, la 5102PR combine boîtier en or rose et lunette platine. Le rendu bicolore donne une impression étrange sans finalement apporter de la chaleur. Heureusement, le travail sur la carrure du boîtier est toujours aussi abouti. La 5106R est célèbre pour avoir été la pièce unique vendue dans le cadre de la vente aux enchères caritative "Only watch" en 2009. Celle-ci est pour moi la plus difficile à apprécier. Si je ne peux pas reprocher à Patek Philippe la volonté de rajouter une complication (l'affichage des quantièmes), le choix d'une lunette guillochée en grains de riz et avec index intégrés me semble en revanche hors de propos. La Celestial se caractérisant par un cadran extrêmement détaillé, une lunette lisse reste la meilleure solution. Quand à la paire d'aiguilles élargies, elle ne m'a jamais semblé d'une grande élégance.
La 5102PR et la 6104G:
Puis en 2010, la 6104G s'inscrit dans la lignée de la 5106R en confirmant l'entrée dans la collection permanente d'une Celestial avec affichage du quantième. La bonne nouvelle est l'application des recettes de la 5102. Malheureusement, la lunette sertie.
Heureusement, la meilleure évolution arrive cette année avec la 6102P. Cette fois-ci, la lunette est bien lisse et sans sertissage et de prime abord la Celestial retrouve sa pureté originelle. Cette montre est tout sauf une surprise. Elle était attendue et désirée du fait des promesses entrevues par la 6104G. Alors, la 6102P est-elle la Celestial ultime renvoyant aux oubliettes la 5102? La réponse est clairement non pour moi. La 5102 reste la référence absolue et je vais vous expliquer mes raisons.
En fait, ce qu'il faut bien comprendre avec la Celestial, c'est la dimension quasi-onirique du cadran. La Celestial ne propose pas seulement l'affichage de l'heure légale devant un ciel étoilé. La Celestial met en scène le ciel et les deux aiguilles deviennent presque accessoires. Les complications astronomiques sont les complications principales plaçant ainsi le propriétaire de la montre dans une autre dimension où le temps s'écoule très paisiblement. N'oublions pas que la Celestial est une montre "statique" du fait de l'absence de trotteuse et de la lente évolution de l'affichage des complications: les heures de passage de Sirius et de la Lune au méridien, les phases et mouvement angulaire de la Lune et évidemment, l'ellipse présente sur le cadran qui permet de délimiter la portion de ciel visible depuis Genève.
Toute l'ingéniosité de la Celestial réside dans l'utilisation conjointe de 3 disques en verre saphir. Le premier disque crée le fond du ciel grâce au verre saphir bleu. Il est animé par une roue à 279 dents. Le second disque est utilisé pour indiquer les phases de lune. Le troisième sert de support à la carte des étoiles et à Sirius. Sa roue possède 356 dents. Les points cardinaux S et N proches de l'ouverture du ciel de Genève sont utilisés pour déterminer l'heure de passage au méridien de Sirius et de la Lune.
La Celestial, c'est un peu la face cachée de la Sky Moon Tourbillon qui devient visible dans un contexte plus abordable que ce soit du point de vue financier (si on compare le prix de la 5102 à celui de la 5002) ou du point de vue du rendu au poignet (la 5102 ayant une épaisseur d'un peu moins de 10mm contre plus de 16mm pour la Sky Moon Tourbillon).
Avec un diamètre de 43,1mm, la 5102 se situe évidemment parmi les plus imposantes Patek Philippe contemporaines. Pourtant, grâce à la beauté de son cadran, à la carte du ciel qui a bien besoin d'un tel diamètre pour une représentation optimale, elle demeure un modèle d'équilibre. La taille est la conséquence de la mise en oeuvre des complications et non l'inverse.
La 6102P ne m'a pas donné la même impression. Tout d'abord, j'ai du mal à percevoir l'adjonction d'une "complication utile" (selon le vocabulaire Patek) telle que l'affichage des quantièmes dans une ambiance plus propice aux voyages imaginaires dans les étoiles qu'à l'affrontement des dures réalités du quotidien. En soi, la date n'est pas si mal intégrée. Les quantièmes sont répartis à la périphérie du cadran et sont indiqués par le biais d'une aiguille croissant. Cependant, ils ont tendance à restreindre visuellement le ciel. Cela est dû au poids esthétique des 31 nombres arabes comparés aux 12 index horaires romains de la première Celestial. La touche de rouge de l'aiguille des quantièmes n'est pas choquante mais je préfère la parfaite harmonie des couleurs de la 5102. L'autre conséquente de cette nouvelle complication est l'agrandissement du boîtier. Il est certes modeste puisque de moins d'un millimètre. Mais au final, les 44mm de diamètre du boîtier platine de la 6102P commencent à faire beaucoup pour une montre ayant vocation à être élégante et raffinée.
Le mouvement de la 6102P est le 240 LU CL C qui se distingue de celui de la 5102 par son épaisseur légèrement supérieure. Les performances sont donc identiques: une fréquence de 3hz, une réserve de marche de 48 heures. Son diamètre de 38mm inclut tout le module de complication. La base du mouvement est en revanche plus petite s'agissant du traditionnel et fiable 240. J'ai une grande confiance dans le 240, c'est un calibre qui m'a toujours séduit par son efficacité au remontage. En retournant la Celestial, quelle que soit la version, cette base semble un peu perdue dans le boîtier. Heureusement, l'architecture du mouvement à micro-rotor est très agréable à observer. Mais n'attendons pas non plus des différences fracassantes par rapport à une montre plus simple utilisant le 240: visuellement c'est la même chose. Le spectacle se déroule côté cadran...
La 6102P est incontestablement plus chargée que la 5102 lorsqu'elle est mise au poignet. La présence de l'aiguille supplémentaire et de l'anneau des quantièmes rend l'ensemble plus dense alors que la 5102 propose des respirations esthétiques grâce à sa plus grande simplicité. Je ne ressens donc ni le même charme ni la même harmonie. En revanche, la qualité de finition du cadran et du boîtier, la façon avec laquelle la lumière crée des reflets bleutés, la magie des complications demeurent. Dans ce domaine-là, la 6102P est digne de la 5102. A noter le poids supérieur de la 6102P dû au changement de métal du boîtier passant de l'or gris au platine.
La 6102P ne m'a donc pas fait oublier la 5102. En voulant la rendre plus complexe, je trouve que Patek a oublié que l'élément le plus important de la Celestial est le sentiment d'harmonie et de quiétude qui y règne. L'anneau des quantièmes altère cette harmonie même s'il demeure la façon la plus élégante d'intégrer un affichage de la date. Malgré ces reproches, la 6102P est l'évolution de la 5102 la plus satisfaisante car, contrairement à la Only Watch 2009, la lunette lisse et la finesse des aiguilles ont été préservées.
Merci à l'équipe Patek Philippe France.
Texte original:
http://equationdutemps.blogspot.fr/2012/08/patek-philippe-6102p.html
Ainsi, la 5102PR combine boîtier en or rose et lunette platine. Le rendu bicolore donne une impression étrange sans finalement apporter de la chaleur. Heureusement, le travail sur la carrure du boîtier est toujours aussi abouti. La 5106R est célèbre pour avoir été la pièce unique vendue dans le cadre de la vente aux enchères caritative "Only watch" en 2009. Celle-ci est pour moi la plus difficile à apprécier. Si je ne peux pas reprocher à Patek Philippe la volonté de rajouter une complication (l'affichage des quantièmes), le choix d'une lunette guillochée en grains de riz et avec index intégrés me semble en revanche hors de propos. La Celestial se caractérisant par un cadran extrêmement détaillé, une lunette lisse reste la meilleure solution. Quand à la paire d'aiguilles élargies, elle ne m'a jamais semblé d'une grande élégance.
La 5102PR et la 6104G:
Puis en 2010, la 6104G s'inscrit dans la lignée de la 5106R en confirmant l'entrée dans la collection permanente d'une Celestial avec affichage du quantième. La bonne nouvelle est l'application des recettes de la 5102. Malheureusement, la lunette sertie.
Heureusement, la meilleure évolution arrive cette année avec la 6102P. Cette fois-ci, la lunette est bien lisse et sans sertissage et de prime abord la Celestial retrouve sa pureté originelle. Cette montre est tout sauf une surprise. Elle était attendue et désirée du fait des promesses entrevues par la 6104G. Alors, la 6102P est-elle la Celestial ultime renvoyant aux oubliettes la 5102? La réponse est clairement non pour moi. La 5102 reste la référence absolue et je vais vous expliquer mes raisons.
En fait, ce qu'il faut bien comprendre avec la Celestial, c'est la dimension quasi-onirique du cadran. La Celestial ne propose pas seulement l'affichage de l'heure légale devant un ciel étoilé. La Celestial met en scène le ciel et les deux aiguilles deviennent presque accessoires. Les complications astronomiques sont les complications principales plaçant ainsi le propriétaire de la montre dans une autre dimension où le temps s'écoule très paisiblement. N'oublions pas que la Celestial est une montre "statique" du fait de l'absence de trotteuse et de la lente évolution de l'affichage des complications: les heures de passage de Sirius et de la Lune au méridien, les phases et mouvement angulaire de la Lune et évidemment, l'ellipse présente sur le cadran qui permet de délimiter la portion de ciel visible depuis Genève.
Toute l'ingéniosité de la Celestial réside dans l'utilisation conjointe de 3 disques en verre saphir. Le premier disque crée le fond du ciel grâce au verre saphir bleu. Il est animé par une roue à 279 dents. Le second disque est utilisé pour indiquer les phases de lune. Le troisième sert de support à la carte des étoiles et à Sirius. Sa roue possède 356 dents. Les points cardinaux S et N proches de l'ouverture du ciel de Genève sont utilisés pour déterminer l'heure de passage au méridien de Sirius et de la Lune.
La Celestial, c'est un peu la face cachée de la Sky Moon Tourbillon qui devient visible dans un contexte plus abordable que ce soit du point de vue financier (si on compare le prix de la 5102 à celui de la 5002) ou du point de vue du rendu au poignet (la 5102 ayant une épaisseur d'un peu moins de 10mm contre plus de 16mm pour la Sky Moon Tourbillon).
Avec un diamètre de 43,1mm, la 5102 se situe évidemment parmi les plus imposantes Patek Philippe contemporaines. Pourtant, grâce à la beauté de son cadran, à la carte du ciel qui a bien besoin d'un tel diamètre pour une représentation optimale, elle demeure un modèle d'équilibre. La taille est la conséquence de la mise en oeuvre des complications et non l'inverse.
La 6102P ne m'a pas donné la même impression. Tout d'abord, j'ai du mal à percevoir l'adjonction d'une "complication utile" (selon le vocabulaire Patek) telle que l'affichage des quantièmes dans une ambiance plus propice aux voyages imaginaires dans les étoiles qu'à l'affrontement des dures réalités du quotidien. En soi, la date n'est pas si mal intégrée. Les quantièmes sont répartis à la périphérie du cadran et sont indiqués par le biais d'une aiguille croissant. Cependant, ils ont tendance à restreindre visuellement le ciel. Cela est dû au poids esthétique des 31 nombres arabes comparés aux 12 index horaires romains de la première Celestial. La touche de rouge de l'aiguille des quantièmes n'est pas choquante mais je préfère la parfaite harmonie des couleurs de la 5102. L'autre conséquente de cette nouvelle complication est l'agrandissement du boîtier. Il est certes modeste puisque de moins d'un millimètre. Mais au final, les 44mm de diamètre du boîtier platine de la 6102P commencent à faire beaucoup pour une montre ayant vocation à être élégante et raffinée.
Le mouvement de la 6102P est le 240 LU CL C qui se distingue de celui de la 5102 par son épaisseur légèrement supérieure. Les performances sont donc identiques: une fréquence de 3hz, une réserve de marche de 48 heures. Son diamètre de 38mm inclut tout le module de complication. La base du mouvement est en revanche plus petite s'agissant du traditionnel et fiable 240. J'ai une grande confiance dans le 240, c'est un calibre qui m'a toujours séduit par son efficacité au remontage. En retournant la Celestial, quelle que soit la version, cette base semble un peu perdue dans le boîtier. Heureusement, l'architecture du mouvement à micro-rotor est très agréable à observer. Mais n'attendons pas non plus des différences fracassantes par rapport à une montre plus simple utilisant le 240: visuellement c'est la même chose. Le spectacle se déroule côté cadran...
La 6102P est incontestablement plus chargée que la 5102 lorsqu'elle est mise au poignet. La présence de l'aiguille supplémentaire et de l'anneau des quantièmes rend l'ensemble plus dense alors que la 5102 propose des respirations esthétiques grâce à sa plus grande simplicité. Je ne ressens donc ni le même charme ni la même harmonie. En revanche, la qualité de finition du cadran et du boîtier, la façon avec laquelle la lumière crée des reflets bleutés, la magie des complications demeurent. Dans ce domaine-là, la 6102P est digne de la 5102. A noter le poids supérieur de la 6102P dû au changement de métal du boîtier passant de l'or gris au platine.
La 6102P ne m'a donc pas fait oublier la 5102. En voulant la rendre plus complexe, je trouve que Patek a oublié que l'élément le plus important de la Celestial est le sentiment d'harmonie et de quiétude qui y règne. L'anneau des quantièmes altère cette harmonie même s'il demeure la façon la plus élégante d'intégrer un affichage de la date. Malgré ces reproches, la 6102P est l'évolution de la 5102 la plus satisfaisante car, contrairement à la Only Watch 2009, la lunette lisse et la finesse des aiguilles ont été préservées.
Merci à l'équipe Patek Philippe France.
Texte original:
http://equationdutemps.blogspot.fr/2012/08/patek-philippe-6102p.html