Texte original:
http://equationdutemps.blogspot.fr/2013/03/patek-5204-vs-lange-1815-rattrapante-qp.html
La présentation récente de la Lange & Söhne 1815 Rattrapante QP me donne l'opportunité de procéder à un comparatif avec son alter-ego de chez Patek, la 5204. Si Patek demeure la marque la plus prestigieuse, Lange, depuis la présentation de sa première collection contemporaine en 1994, a su trouver sa place au sommet de la pyramide. C'est la raison pour laquelle Patek et Lange sont considérées, à juste titre, comme deux des marques qui symbolisent le mieux l'excellence de la Haute Horlogerie. Elles sont souvent comparées alors que tout les oppose: pays d'origine, histoires, style, esthétiques, architectures des mouvements, complications, volume de production. Il est impossible de confondre une Patek avec une Lange et cela se ressent immédiatement dans ce comparatif car chaque montre est profondément marquée par le style propre de chaque manufacture. C'est ce que nous attendons d'ailleurs de marques de ce niveau: une approche unique, un engagement fort, une conviction que les principes appliqués sont les meilleurs.
La 1815 Rattrapante QP fut dévoilée lors du SIHH 2013 soit quelques mois seulement après la 5204 qui le fut lors de la Foire de Bâle de 2012. Elles concentrent donc le savoir-faire actuel des deux manufactures autour de complications qu'elles maîtrisent bien: le chronographe rattrapante et le Quantième Perpétuel. Je vous propose de les comparer autour de plusieurs thèmes qui vont mettre en avant les nettes différences de conception.
Les forces en présence:
Lange 1815 Rattrapante QP:
Patek 5204:
A) Originalité dans la collection
La 5204 n'est pas le premier chronographe rattrapante QP de Patek, succédant à la controversée 5004: c'est toute la magie Patek, malgré ses problèmes à répétition, la 5004 est demeurée une montre fascinante. La 5204 a ainsi une double mission: l'une officielle qui consiste à succéder à sa devancière en utilisant cette fois-ci le mouvement chronographe maison, l'autre moins avouable qui a le but de faire oublier les problèmes de fiabilité de la 5004. Esthétiquement parlant, la 5204 possède un air de famille certain avec le chronographe QP 5270, tout du moins au niveau de l'organisation du cadran car le boîtier de la 5270 est beaucoup plus audacieux avec ses cornes proéminentes. Bref, chez Patek, nous nous sentons en territoire connu.
La 1815 Rattrapante QP est en revanche bien plus singulière au sein de la collection Lange: c'est la première fois que Lange s'attaque à un tel regroupement de complications même si elles ont été traitées de façon séparées précédemment (Datograph Perpetual - Double Split). Rarement une 1815 aura été aussi compliquée puisque les 1815 précédentes se distinguaient par au plus deux complications additionnelles (jour et rang de la semaine pour la Kalendarwoche) et plus généralement par une seule: réserve de marche, phase de lune. La 1815 Rattrapante QP est en outre la première Lange qui affiche la date... sans la grande date (tout comme la Grande Complication d'ailleurs). Une singularité due à la volonté d'organiser différemment le cadran par rapport à un Datograph Perpetual.
Vainqueur: Lange 1815 Rattrapante QP pour ses particularités au sein de la collection Lange
B) Boîtier et confort au porté
Les différences d'approche se sentent très rapidement. La 5204 est plus contenue que la 1815 Rattrapante QP grâce à un diamètre de 40mm contre 41,9mm pour la Lange. En revanche, les épaisseurs sont similaires: 14,19mm pour la Patek, 14,7mm pour la Lange. Cette dernière fait un poil plus élancée mais leurs rapports diamètre/épaisseur restent très proches.
La 5204 est même plus petite que la 5270 (1mm en moins) et surtout ses cornes sont moins prononcées ce qui la rend plus agréable à porter que sa cousine de Patek, pourtant moins compliquée.
La 1815 Rattrapante QP est une montre plus lourde et cela se sent. Lange ne lésine pas dans l'utilisation des matériaux précieux et le poids propre du mouvement accentue ce sentiment. Incontestablement, la 5204 est la plus facile à porter au quotidien et la plus confortable. La 1815 Rattrapante QP nécessite un bon positionnement sur le poignet pour bien en profiter.
A noter qu'à ce jour, la 5204 n'est disponible qu'en platine alors que la 1815 Rattrapante QP existe en platine et en or rose.
Vainqueur: Patek 5204 pour son confort
C) Cadran
Je me retrouve en terrain connu avec la 5204 puisque les principes de la 5270 ont été préservés. Afin d'alléger les sous-cadrans et les rendre plus lisibles, quatre informations sont affichées par le biais de guichets: les jours et les mois de façon traditionnelle, l'année bissextile et le jour/nuit par de très discrètes ouvertures rondes dans la partie inférieure du cadran. L'intérêt est que chaque sous-cadran n'est occupé que par une seule aiguille. Les quantièmes à 6 heures sont très lisibles: n'oublions pas que c'est l'information du calendrier la plus importante à lire.
L'organisation du cadran de la 1815 Rattrapante QP est moins naturelle chez Lange: comme précisé précédemment, c'est la première fois que la grande date est abandonnée. Je reprochais au Datograph Perpetual le côté fouillis de ses sous-compteurs. Ils sont ici plus harmonieux, plus lisibles mais c'est au détriment des quantièmes évidemment plus difficiles à lire par le biais d'une aiguille qu'avec un double-guichet de grande date. La présence de deux aiguilles dans les sous-cadrans ne simplifie pas la tâche non plus. L'ensemble reste cependant très accessible même si la Patek 5204 me semble plus convaincante sur cet aspect. Mais les codes couleurs des aiguilles de la Lange sont un plus: ils délimitent de façon claire les affichages liés au chronographe (aiguilles bleues) et le reste.
Vainqueur: match nul, la Patek 5204 présente une organisation de cadran optimale et plus lisible mais j'apprécie les codes couleurs des aiguilles de la Lange.
D) Fonctions secondaires
Les deux montres proposent les mêmes principales complications, cependant elles n'ont pas les mêmes complications secondaires. La 5204 affiche un très utile indicateur jour/nuit dans un guichet qui facilite grandement la mise à l'heure et évite tout accident lié à l'utilisation des correcteurs en dehors la plage horaire adéquate. La Lange ne possède pas d'affichage sur 24 heures. Elle arbore en revanche un indicateur de réserve de marche bienvenu dans le contexte d'une montre à quantième perpétuel pour éviter tout arrêt suite à un oubli de remontage.
Vainqueur: match nul, chaque indicateur complémentaire est utile. A noter que les deux montres possèdent une trotteuse permanente, un très bon point.
E) A l'usage
La grande force des mouvements à remontage manuel de Lange est le plaisir qu'ils procurent à leur usage quotidien: remontage, activation des poussoirs, la perfection est proche et cette 1815 Rattrapante QP ne déroge pas à la règle! La Patek 5204 ne démérite pas sur cet aspect et prend même l'avantage pour la mise en route de la rattrapante: le poussoir intégré dans la couronne est bien plus pratique que le poussoir à 10 heures de la Lange... reproche déjà fait sur la Double-Split.
Vainqueur: Patek 5204 pour son poussoir de rattrapante intégré dans la couronne
F) Performances du mouvement
Le mouvement de la Patek 5204, le CHR 29-535 PS Q profite de toutes les améliorations apportées par le mouvement chronographe maison par rapport à la base Nouvelle-Lemania. Sa fréquence de 4hz et sa réserve de marche de 65 heures le rendent plus performant que le L101.1 pénalisé par sa réserve de marche plus courte (42 heures pour une fréquence de 3hz). Grâce à cette réserve de marche qui dépasse les 60 heures, la Patek 5204 peut être laissée le week-end et récupérée le lundi matin ce qui n'est pas le cas de la Lange.
Grâce à l'utilisation du mouvement chronographe maison, Patek comble corrige un point qui constituait un retard par rapport à Lange: le compteur des minutes devient instantané alors que chez Lange, il l'est depuis la présentation du Datograph en 1999.
Vainqueur: Patek 5204 pour sa réserve de marche plus longue malgré sa fréquence plus élevé, un point important dans le contexte d'une montre QP.
Le mouvement Patek CHR 29-535 PS Q:
Le mouvement Lange L101.1:
G) Architecture du mouvement
Incontestablement, Patek et Lange ont tenu à définir les mouvements les plus aboutis possibles pour ces montres qui constituent une sorte de porte-étendard pour leurs manufactures respectives.
La base de la Patek 5204 est le mouvement chronographe maison sur laquelle le module de QP est greffé. L'intégration du mécanisme de la rattrapante a été particulièrement soignée grâce à l'isolateur de levier de rattrapante plus fiable et au mécanisme de réduction des défauts d'alignement des deux aiguilles chronographe et rattrapante. L'isolateur permet de réduire l'impact de l'arrêt du mobile de rattrapante sur l'amplitude du balancier et donc sur le comportement de la montre. Il est plus fin que celui de la 5004 car c'est le chapeau de la roue à colonne qui sert lui-même de ressort. De plus la roue d'isolation tourne dans les deux sens cette fois-ci. Le mécanisme de réduction des défauts d'alignement a pour but de réduire le très léger écart qui peut exister entre les deux aiguilles du fait du décalage entre le mobile de rattrapante et le mobile de chronographe lorsque le premier est remis à zéro.
Esthétiquement, le CHR 29-535 PS Q est très proche du CH 29-535 PS Q de la 5270: seul finalement l'adjonction du mécanisme de rattrapante les distingue. Ce mécanisme met le mouvement en valeur en lui donnant plus de profondeur et surtout en cassant les courbes un peu paresseuses des ponts et de certains éléments. Je le trouve ainsi bien plus spectaculaire dans ce contexte.
Lange a choisi une nouvelle voie pour notre plus grand plaisir: le mouvement L101.1 présente une toute nouvelle architecture et ne ressemble ni au mouvement du Double-Split ni au mouvement du Datograph Perpetual même si, évidemment, il partage une approche stylistique et technique similaire qui lui donne cette signature "Lange".
Il marque une nouvelle orientation: en effet, alors que les mouvements chronographe de la manufacture saxonne sont relativement épais du fait de leur construction, un effort particulier a été mené pour réduire cette épaisseur. Ainsi les leviers, bascules et marteau ont été affinés par rapport à ceux d'un mouvement chronographe traditionnel Lange. Plus fins, ils sont aussi légèrement plus larges. Le résultat de cette cure d'amaigrissement est plutôt réussi car le mouvement présente une hauteur (9,1mm) proche de celle du mouvement Patek (8,7mm). Je rappelle que le mouvement du Double-Split, certes à double-rattrapante mais sans module QP est de 9,45mm ce qui situe la performance .
Il est intéressant de remarquer que malgré des dimensions similaires, le mouvement Lange contient 631 composants contre 496 pour le mouvement Patek: une sorte de constante entre les deux marques, Patek privilégiant l'intégration tandis que Lange n'hésite pas à rajouter des composants.
Vous noterez aussi la position des roues à colonne, différente de celle du Double-Split, la roue à colonne du chronographe étant située entre les poussoirs. Même s'il perd un peu son côté "dentelle", le mouvement L101.1 demeure spectaculaire et un vrai régal pour les yeux.
Vainqueur: match nul, la Lange 1815 Rattrapante QP séduit par le côté plus spectaculaire de son mouvement et la nouvelle architecture qu'il présente. Le seul bémol est que l'organe régulant devient quasiment invisible même s'il se perçoit sous le mécanisme de rattrapante. L'intelligence de conception du mouvement de la Patek 5204 est à souligner et équilibre le comparatif.
H) Finitions du mouvement
Deux écoles s'affrontent: l'une plutôt discrète, l'autre plus démonstrative. Je dois avouer que Lange arrive tout de même à me séduire plus par son style particulièrement maîtrisé. A aucun moment, malgré les vis bleuies, les chatons en or, je ne ressens un sentiment d'excès. De plus, j'apprécie la perfection du prolongement des côtes de Glashütte malgré la nette séparation des ponts et la beauté de sa présentation. Le mouvement de la Patek est évidemment lui-aussi très agréable à observer mais je regrette presque la présentation du mouvement sur base Nouvelle-Lemania. Je trouve que Patek s'est facilité la tâche de finition du fait de la forme de certains éléments.
Vainqueur: Lange 1815 Rattrapante QP qui arrive à être plus démonstratif sans verser dans l'excès
I) Esthétique et finitions générales
Une fois de plus, deux chemins opposés ont été choisis. Patek adopte résolument un style général plus contemporain. Cela se sent dans l'organisation du cadran, dans la police de caractère. Lange est beaucoup plus classique et s'inspire des montres de poche traditionnelles. Si le cadran de la Patek est particulièrement bien pensé, il y a quelques détails qui me chagrinent cependant: la taille des index par exemple. Très présents et épais, ils cassent un peu le raffinement de la montre du fait de leur différence de longueur entre la partie supérieure et la partie inférieure du cadran. La forme des aiguilles n'est pas non plus très élégante à mon avis. Je trouve que l'esthétique générale de la 1815 Rattrapante QP est plus cohérente et surtout qu'elle dégage une qualité perçue supérieure. A ce titre, l'observation de l'affichage de la phase de lune en est la meilleure preuve. Le ciel étoilé est lumineux, rayonnant sur la Lange et beaucoup plus austère et triste sur la Patek. Les aiguilles Alpha de la Lange sont idéales et la beauté du cadran est bien mise en valeur.
Vainqueur: Lange 1815 Rattrapante QP pour sa meilleure qualité perçue et du fait de quelques choix un peu décevant de la part de Patek
Conclusion: match nul? Non, deux styles qui s'affrontent.
En faisant le bilan général, j'obtiens le score suivant: 3 avantages pour Patek, 3 avantages pour Lange et trois égalités. Les deux montres repartent-elles dos à dos? C'est plus compliqué que cette pure arithmétique. Au final, cette confrontation n'avait par pour but d'affirmer que l'une est meilleure que l'autre. Elle avait en revanche l'objectif de démontrer que face à des complications similaires, Patek et Lange allaient choisir des options différentes. Les forces de la Patek 5204 sont son style contemporain, son usage facilité au quotidien tandis que la Lange 1815 Rattrapante QP recrée le raffinement des montres de poche de haute volée. A titre personnel, j'ai une préférence pour la Lange que je trouve plus spectaculaire et dont certains détails de finition m'apparaissent plus aboutis. La Patek 5204 m'a également séduit mais pour d'autres raisons: l'intelligence de conception du mouvement et l'organisation du cadran par exemple. Mais le plus important derrière cette analyse est de remarquer que chacune de ces montres est digne de la manufacture qu'elle représente et qu'au final, leurs différences ne font que renforcer leurs atouts respectifs.
Un grand merci aux équipes Patek et Lange.
http://equationdutemps.blogspot.fr/2013/03/patek-5204-vs-lange-1815-rattrapante-qp.html
La présentation récente de la Lange & Söhne 1815 Rattrapante QP me donne l'opportunité de procéder à un comparatif avec son alter-ego de chez Patek, la 5204. Si Patek demeure la marque la plus prestigieuse, Lange, depuis la présentation de sa première collection contemporaine en 1994, a su trouver sa place au sommet de la pyramide. C'est la raison pour laquelle Patek et Lange sont considérées, à juste titre, comme deux des marques qui symbolisent le mieux l'excellence de la Haute Horlogerie. Elles sont souvent comparées alors que tout les oppose: pays d'origine, histoires, style, esthétiques, architectures des mouvements, complications, volume de production. Il est impossible de confondre une Patek avec une Lange et cela se ressent immédiatement dans ce comparatif car chaque montre est profondément marquée par le style propre de chaque manufacture. C'est ce que nous attendons d'ailleurs de marques de ce niveau: une approche unique, un engagement fort, une conviction que les principes appliqués sont les meilleurs.
La 1815 Rattrapante QP fut dévoilée lors du SIHH 2013 soit quelques mois seulement après la 5204 qui le fut lors de la Foire de Bâle de 2012. Elles concentrent donc le savoir-faire actuel des deux manufactures autour de complications qu'elles maîtrisent bien: le chronographe rattrapante et le Quantième Perpétuel. Je vous propose de les comparer autour de plusieurs thèmes qui vont mettre en avant les nettes différences de conception.
Les forces en présence:
Lange 1815 Rattrapante QP:
Patek 5204:
A) Originalité dans la collection
La 5204 n'est pas le premier chronographe rattrapante QP de Patek, succédant à la controversée 5004: c'est toute la magie Patek, malgré ses problèmes à répétition, la 5004 est demeurée une montre fascinante. La 5204 a ainsi une double mission: l'une officielle qui consiste à succéder à sa devancière en utilisant cette fois-ci le mouvement chronographe maison, l'autre moins avouable qui a le but de faire oublier les problèmes de fiabilité de la 5004. Esthétiquement parlant, la 5204 possède un air de famille certain avec le chronographe QP 5270, tout du moins au niveau de l'organisation du cadran car le boîtier de la 5270 est beaucoup plus audacieux avec ses cornes proéminentes. Bref, chez Patek, nous nous sentons en territoire connu.
La 1815 Rattrapante QP est en revanche bien plus singulière au sein de la collection Lange: c'est la première fois que Lange s'attaque à un tel regroupement de complications même si elles ont été traitées de façon séparées précédemment (Datograph Perpetual - Double Split). Rarement une 1815 aura été aussi compliquée puisque les 1815 précédentes se distinguaient par au plus deux complications additionnelles (jour et rang de la semaine pour la Kalendarwoche) et plus généralement par une seule: réserve de marche, phase de lune. La 1815 Rattrapante QP est en outre la première Lange qui affiche la date... sans la grande date (tout comme la Grande Complication d'ailleurs). Une singularité due à la volonté d'organiser différemment le cadran par rapport à un Datograph Perpetual.
Vainqueur: Lange 1815 Rattrapante QP pour ses particularités au sein de la collection Lange
B) Boîtier et confort au porté
Les différences d'approche se sentent très rapidement. La 5204 est plus contenue que la 1815 Rattrapante QP grâce à un diamètre de 40mm contre 41,9mm pour la Lange. En revanche, les épaisseurs sont similaires: 14,19mm pour la Patek, 14,7mm pour la Lange. Cette dernière fait un poil plus élancée mais leurs rapports diamètre/épaisseur restent très proches.
La 5204 est même plus petite que la 5270 (1mm en moins) et surtout ses cornes sont moins prononcées ce qui la rend plus agréable à porter que sa cousine de Patek, pourtant moins compliquée.
La 1815 Rattrapante QP est une montre plus lourde et cela se sent. Lange ne lésine pas dans l'utilisation des matériaux précieux et le poids propre du mouvement accentue ce sentiment. Incontestablement, la 5204 est la plus facile à porter au quotidien et la plus confortable. La 1815 Rattrapante QP nécessite un bon positionnement sur le poignet pour bien en profiter.
A noter qu'à ce jour, la 5204 n'est disponible qu'en platine alors que la 1815 Rattrapante QP existe en platine et en or rose.
Vainqueur: Patek 5204 pour son confort
C) Cadran
Je me retrouve en terrain connu avec la 5204 puisque les principes de la 5270 ont été préservés. Afin d'alléger les sous-cadrans et les rendre plus lisibles, quatre informations sont affichées par le biais de guichets: les jours et les mois de façon traditionnelle, l'année bissextile et le jour/nuit par de très discrètes ouvertures rondes dans la partie inférieure du cadran. L'intérêt est que chaque sous-cadran n'est occupé que par une seule aiguille. Les quantièmes à 6 heures sont très lisibles: n'oublions pas que c'est l'information du calendrier la plus importante à lire.
L'organisation du cadran de la 1815 Rattrapante QP est moins naturelle chez Lange: comme précisé précédemment, c'est la première fois que la grande date est abandonnée. Je reprochais au Datograph Perpetual le côté fouillis de ses sous-compteurs. Ils sont ici plus harmonieux, plus lisibles mais c'est au détriment des quantièmes évidemment plus difficiles à lire par le biais d'une aiguille qu'avec un double-guichet de grande date. La présence de deux aiguilles dans les sous-cadrans ne simplifie pas la tâche non plus. L'ensemble reste cependant très accessible même si la Patek 5204 me semble plus convaincante sur cet aspect. Mais les codes couleurs des aiguilles de la Lange sont un plus: ils délimitent de façon claire les affichages liés au chronographe (aiguilles bleues) et le reste.
Vainqueur: match nul, la Patek 5204 présente une organisation de cadran optimale et plus lisible mais j'apprécie les codes couleurs des aiguilles de la Lange.
D) Fonctions secondaires
Les deux montres proposent les mêmes principales complications, cependant elles n'ont pas les mêmes complications secondaires. La 5204 affiche un très utile indicateur jour/nuit dans un guichet qui facilite grandement la mise à l'heure et évite tout accident lié à l'utilisation des correcteurs en dehors la plage horaire adéquate. La Lange ne possède pas d'affichage sur 24 heures. Elle arbore en revanche un indicateur de réserve de marche bienvenu dans le contexte d'une montre à quantième perpétuel pour éviter tout arrêt suite à un oubli de remontage.
Vainqueur: match nul, chaque indicateur complémentaire est utile. A noter que les deux montres possèdent une trotteuse permanente, un très bon point.
E) A l'usage
La grande force des mouvements à remontage manuel de Lange est le plaisir qu'ils procurent à leur usage quotidien: remontage, activation des poussoirs, la perfection est proche et cette 1815 Rattrapante QP ne déroge pas à la règle! La Patek 5204 ne démérite pas sur cet aspect et prend même l'avantage pour la mise en route de la rattrapante: le poussoir intégré dans la couronne est bien plus pratique que le poussoir à 10 heures de la Lange... reproche déjà fait sur la Double-Split.
Vainqueur: Patek 5204 pour son poussoir de rattrapante intégré dans la couronne
F) Performances du mouvement
Le mouvement de la Patek 5204, le CHR 29-535 PS Q profite de toutes les améliorations apportées par le mouvement chronographe maison par rapport à la base Nouvelle-Lemania. Sa fréquence de 4hz et sa réserve de marche de 65 heures le rendent plus performant que le L101.1 pénalisé par sa réserve de marche plus courte (42 heures pour une fréquence de 3hz). Grâce à cette réserve de marche qui dépasse les 60 heures, la Patek 5204 peut être laissée le week-end et récupérée le lundi matin ce qui n'est pas le cas de la Lange.
Grâce à l'utilisation du mouvement chronographe maison, Patek comble corrige un point qui constituait un retard par rapport à Lange: le compteur des minutes devient instantané alors que chez Lange, il l'est depuis la présentation du Datograph en 1999.
Vainqueur: Patek 5204 pour sa réserve de marche plus longue malgré sa fréquence plus élevé, un point important dans le contexte d'une montre QP.
Le mouvement Patek CHR 29-535 PS Q:
Le mouvement Lange L101.1:
G) Architecture du mouvement
Incontestablement, Patek et Lange ont tenu à définir les mouvements les plus aboutis possibles pour ces montres qui constituent une sorte de porte-étendard pour leurs manufactures respectives.
La base de la Patek 5204 est le mouvement chronographe maison sur laquelle le module de QP est greffé. L'intégration du mécanisme de la rattrapante a été particulièrement soignée grâce à l'isolateur de levier de rattrapante plus fiable et au mécanisme de réduction des défauts d'alignement des deux aiguilles chronographe et rattrapante. L'isolateur permet de réduire l'impact de l'arrêt du mobile de rattrapante sur l'amplitude du balancier et donc sur le comportement de la montre. Il est plus fin que celui de la 5004 car c'est le chapeau de la roue à colonne qui sert lui-même de ressort. De plus la roue d'isolation tourne dans les deux sens cette fois-ci. Le mécanisme de réduction des défauts d'alignement a pour but de réduire le très léger écart qui peut exister entre les deux aiguilles du fait du décalage entre le mobile de rattrapante et le mobile de chronographe lorsque le premier est remis à zéro.
Esthétiquement, le CHR 29-535 PS Q est très proche du CH 29-535 PS Q de la 5270: seul finalement l'adjonction du mécanisme de rattrapante les distingue. Ce mécanisme met le mouvement en valeur en lui donnant plus de profondeur et surtout en cassant les courbes un peu paresseuses des ponts et de certains éléments. Je le trouve ainsi bien plus spectaculaire dans ce contexte.
Lange a choisi une nouvelle voie pour notre plus grand plaisir: le mouvement L101.1 présente une toute nouvelle architecture et ne ressemble ni au mouvement du Double-Split ni au mouvement du Datograph Perpetual même si, évidemment, il partage une approche stylistique et technique similaire qui lui donne cette signature "Lange".
Il marque une nouvelle orientation: en effet, alors que les mouvements chronographe de la manufacture saxonne sont relativement épais du fait de leur construction, un effort particulier a été mené pour réduire cette épaisseur. Ainsi les leviers, bascules et marteau ont été affinés par rapport à ceux d'un mouvement chronographe traditionnel Lange. Plus fins, ils sont aussi légèrement plus larges. Le résultat de cette cure d'amaigrissement est plutôt réussi car le mouvement présente une hauteur (9,1mm) proche de celle du mouvement Patek (8,7mm). Je rappelle que le mouvement du Double-Split, certes à double-rattrapante mais sans module QP est de 9,45mm ce qui situe la performance .
Il est intéressant de remarquer que malgré des dimensions similaires, le mouvement Lange contient 631 composants contre 496 pour le mouvement Patek: une sorte de constante entre les deux marques, Patek privilégiant l'intégration tandis que Lange n'hésite pas à rajouter des composants.
Vous noterez aussi la position des roues à colonne, différente de celle du Double-Split, la roue à colonne du chronographe étant située entre les poussoirs. Même s'il perd un peu son côté "dentelle", le mouvement L101.1 demeure spectaculaire et un vrai régal pour les yeux.
Vainqueur: match nul, la Lange 1815 Rattrapante QP séduit par le côté plus spectaculaire de son mouvement et la nouvelle architecture qu'il présente. Le seul bémol est que l'organe régulant devient quasiment invisible même s'il se perçoit sous le mécanisme de rattrapante. L'intelligence de conception du mouvement de la Patek 5204 est à souligner et équilibre le comparatif.
H) Finitions du mouvement
Deux écoles s'affrontent: l'une plutôt discrète, l'autre plus démonstrative. Je dois avouer que Lange arrive tout de même à me séduire plus par son style particulièrement maîtrisé. A aucun moment, malgré les vis bleuies, les chatons en or, je ne ressens un sentiment d'excès. De plus, j'apprécie la perfection du prolongement des côtes de Glashütte malgré la nette séparation des ponts et la beauté de sa présentation. Le mouvement de la Patek est évidemment lui-aussi très agréable à observer mais je regrette presque la présentation du mouvement sur base Nouvelle-Lemania. Je trouve que Patek s'est facilité la tâche de finition du fait de la forme de certains éléments.
Vainqueur: Lange 1815 Rattrapante QP qui arrive à être plus démonstratif sans verser dans l'excès
I) Esthétique et finitions générales
Une fois de plus, deux chemins opposés ont été choisis. Patek adopte résolument un style général plus contemporain. Cela se sent dans l'organisation du cadran, dans la police de caractère. Lange est beaucoup plus classique et s'inspire des montres de poche traditionnelles. Si le cadran de la Patek est particulièrement bien pensé, il y a quelques détails qui me chagrinent cependant: la taille des index par exemple. Très présents et épais, ils cassent un peu le raffinement de la montre du fait de leur différence de longueur entre la partie supérieure et la partie inférieure du cadran. La forme des aiguilles n'est pas non plus très élégante à mon avis. Je trouve que l'esthétique générale de la 1815 Rattrapante QP est plus cohérente et surtout qu'elle dégage une qualité perçue supérieure. A ce titre, l'observation de l'affichage de la phase de lune en est la meilleure preuve. Le ciel étoilé est lumineux, rayonnant sur la Lange et beaucoup plus austère et triste sur la Patek. Les aiguilles Alpha de la Lange sont idéales et la beauté du cadran est bien mise en valeur.
Vainqueur: Lange 1815 Rattrapante QP pour sa meilleure qualité perçue et du fait de quelques choix un peu décevant de la part de Patek
Conclusion: match nul? Non, deux styles qui s'affrontent.
En faisant le bilan général, j'obtiens le score suivant: 3 avantages pour Patek, 3 avantages pour Lange et trois égalités. Les deux montres repartent-elles dos à dos? C'est plus compliqué que cette pure arithmétique. Au final, cette confrontation n'avait par pour but d'affirmer que l'une est meilleure que l'autre. Elle avait en revanche l'objectif de démontrer que face à des complications similaires, Patek et Lange allaient choisir des options différentes. Les forces de la Patek 5204 sont son style contemporain, son usage facilité au quotidien tandis que la Lange 1815 Rattrapante QP recrée le raffinement des montres de poche de haute volée. A titre personnel, j'ai une préférence pour la Lange que je trouve plus spectaculaire et dont certains détails de finition m'apparaissent plus aboutis. La Patek 5204 m'a également séduit mais pour d'autres raisons: l'intelligence de conception du mouvement et l'organisation du cadran par exemple. Mais le plus important derrière cette analyse est de remarquer que chacune de ces montres est digne de la manufacture qu'elle représente et qu'au final, leurs différences ne font que renforcer leurs atouts respectifs.
Un grand merci aux équipes Patek et Lange.